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Technique de l'enluminure

L'or, les pigments, les liants, l’application et les supports...

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L'or

Inaltérable, il est le matériau par excellence de l'enluminure.

Il se présente en poudre ou en feuille. Cette dernière délicate de manipulation à cause de son extrême finesse, ne souffre pas le moindre courant d'air.

L'or est appliqué sur un mordant qui assure l'adhérence :
- pour l'or en poudre, un mordant à la gomme arabique est directement mélangé à la poudre,
- pour l'or en feuille, un mordant soit à l’œuf soit aux cristaux d'ammoniac soit un gesso à base de plâtre éteint si l'on désire du relief sous la feuille.

Selon la technique adoptée, les enlumineurs brunissent à l'aide d'une pierre d'agate pour renforcer l'éclat.

L'or est abondamment utilisé jusqu'au début du XIV° siècle sous l'influence religieuse puis avec davantage de parcimonie lorsque les scènes deviendront plus réalistes.

Les pigments

Orpiment, murex, azurite, cochenille, porphyre, curcuma...broyés, en décoction, mêlés à l'eau de gomme d'arabique ou à la colle de peau de poisson. Tout cela semble sortir d'un livre d'alchimie. Le commerce des pigments florissant dès l'Antiquité contribue à la variété des couleurs présentes sur les manuscrits.

Toutes les couleurs ont une origine soit végétale, soit minérale soit animale : - les rouges, cramoisi ou vermillon, sont obtenus à partir d'oxyde de plomb, de cinabre, de kermès rouge, de murex... - les bleus offrent de nombreuses nuances selon l'origine ; le lapis-lazuli, pierre semi-précieuse provenant d'Asie centrale, est le plus apprécié mais aussi le plus cher d'entre tous ; ce bleu outremer est d'un éclat particulièrement profond ; du fait de sa rareté, on le réserve aux éléments les plus importants comme la robe de la Vierge. - les jaunes proviennent du safran, de la sève de chélidoine, de l'orpiment. - les verts sont extraits de la malachite, du vert-de-gris, de l'argile verte... - le blanc vient de la céruse, très toxique et fabriquée à partir du plomb.

Pour être utilisables en tant que couleurs, les matières premières sont sujettes à une longue préparation : réduites en poudre très fine à l'aide de mortier et de pilon puis filtrées au travers d'un tissu, elles peuvent enfin être mêlées à un liant pour obtenir les diverses peintures.

Liants et application

Après préparation, les pigments sont associés à un liant qui en assure l'adhérence sur la feuille. Au Moyen Age, les manuscrits sont peints à l'eau de gomme arabique ou à la colle de peau de poisson ou à la détrempe à l’œuf. Dans cette dernière technique, l’œuf dilué à l'eau sert de liant au pigment pur, broyé très finement.

Le mélange se fait au dernier moment car la détrempe sèche rapidement. On l'applique en couches successives sans épaisseur jusqu'à l'obtention de l'intensité désirée. On travaille ton sur ton, les pigments ne sont pas mélangés ensemble pour éviter des réactions indésirables. On attend que la couche sèche pour appliquer la seconde afin que la feuille retrouve son pouvoir absorbant. Cela nous permet sans doute d'admirer aujourd'hui des nuances d'une incroyable variété et fraîcheur.

Selon la place de l'or dans l'enluminure, celui-ci est placé en premier ou en final. Il est souvent cerné d'encre noire donnant ainsi un contour bien défini.

Les supports

Il existe des enluminures sur rouleaux de papyrus mais peu nombreuses et placées souvent en début de rouleau. Le papyrus manque de résistance et ne supporte pas plusieurs couches de peinture. Il se dégrade à l'humidité. De plus, l'Egypte en détient le monopole du fait que ce roseau "papyrus" pousse exclusivement sur les rives du Nil.

La mise au point progressive du parchemin, peau de bête apprêtée, va contribuer au développement du livre et donc de l'enluminure. En effet, veaux, moutons, chèvres desquels on tire cette nouvelle feuille, sont présents dans tous les pays. Il n'y a plus de monopole ce qui n'empêche pas la cherté du produit.

Le parchemin demande une longue préparation. La peau est tannée, lavée, plongée dans la chaux pour la ramollir et éviter sa décomposition, rincée, grattée, tendue sur cadre et encore grattée pour éliminer toutes les graisses et frottée à la pierre ponce pour le rendre mince et propre à l'écriture. Un beau parchemin provient d'un animal jeune à la peau fine : le grain est plus fin et l'on s'assure d'une peau "maigre". La présence de graisse empêche l'adhérence des encres et des peintures. Le vélin est le plus prestigieux des parchemins ; il est issu d'animaux morts-nés, veau ou agneau, ce qui le rend très fin et très blanc.

Le papier existe déjà au II° siècle en Chine, fabriqué à partir de fibres végétales mises en pâte avec de l'eau puis séchées. Il arrive en Occident vers le XI° siècle mais se trouve réservé aux ouvrages les moins luxueux. Peu à peu les moulins à papier vont se multiplier, améliorer les techniques de préparation si bien qu'il commence à concurrencer le parchemin à la fin du XV° siècle.